La philosophie du forfait
Au début du fonctionnement de la Maison Médicale, notre système de fonctionnement reposait sur le paiement à l’acte, comme partout ailleurs.
Cette façon de travailler ne nous satisfaisait pas pour plusieurs raisons et notamment celle-ci :
« Qu’est-ce que le fondement du paiement à l’acte ? C’est la maladie ! »
Dans cette logique, plus nous rencontrions de patients malades, plus nous gagnions de l’argent et donc : La maladie finançait notre salaire et déterminait notre qualité de vie.
Bien sûr, nous étions payés pour notre travail mais, à notre avis, notre rôle est surtout de garder et de restaurer le plus longtemps possible la santé des patients qui s’adressent à nous.
Le système de paiement à l’acte était donc pour nous contradictoire et même malsain par rapport à nos objectifs qui sont :
– Faciliter l’accès et la qualité des soins égaux pour tous ;
– Aider le patient à atteindre un maximum d’autonomie ;
– Viser à ce que la prévention et l’éducation pour la santé prennent de
plus en plus d’importance par rapport au curatif.
Ce système à l’acte nous limitait considérablement dans notre travail, seule la maladie pouvant nous interpeller et justifier nos interventions.
Il ne nous était pas possible de vous proposer à vous, patients, de consulter l’équipe médicale simplement pour des examens ou des conseils de prévention à partir du moment où vous étiez débarrassés de votre problème aigu (que ce soit dans le domaine médical, kiné ou infirmier).
En conscience, nous ne pouvions pas vous proposer ce type de contact puisque nous devions vous demander de le payer.
Ce sont ces raisons qui nous ont poussés à chercher un autre système de paiement du travail de la Maison Médicale, un système qui récompense la conquête et le maintien de la santé : le système forfaitaire à l’abonnement qui finance la santé et non la maladie.
Le forfait : un système basé sur la solidarité
Un système qui n’est pas gratuit. Souvent des patients, anciens ou nouveaux, nous disent ne pas comprendre le système de paiement des soins à la Maison Médicale et sa soi-disant «gratuité». Nous entendons aussi des patients qui ne sont pas encore inscrits nous dire «Mettez-le sur le compte de ma femme « (qui elle est inscrite). Ou encore certains nous dire tout simplement «Cela n’est pas possible de ne plus rien devoir payer». Et pourtant …
C’est pour répondre à toutes ces interrogations que nous souhaitons vous présenter les réflexions suivantes.
Ce système est basé avant tout sur une notion de solidarité entre tous, jeunes et vieux, travailleurs et chômeurs, salariés et indépendants… Tout se passe par une ponction sur les revenus du travail.
Ainsi, si vous gagnez 100 € brut, votre salaire imposable ne sera que de 86,93 €, desquels on vous enlèvera encore un précompte (de 13,07 %) avant d’arriver à votre net.
Où disparaissent ces 13,07 € ?
- 4,70 € sont versés à l’assurance maladie-invalidité (mutuelle) ;
- 0,87 € sont versés à une caisse de chômage pour le paiement des revenus aux chômeurs ;
- 7,50 € sont versés à une caisse de pension pour le paiement des pensions des pensionnés actuels.
Mais les 100 € de votre salaire brut coûteront en fait 132,39 € à votre patron car il devra payer les sommes suivantes:
- 6,15 € sont versés à l’assurance maladie-invalidité (mutuelle) ;
- 1,46 € sont versés à une caisse de chômage pour le paiement des revenus aux chômeurs ;
- 8,86 € sont versés à une caisse de pension pour le paiement des pensions des actuels pensionnés ;
- 7,00 € sont versés aux allocations familiales pour le paiement des allocations familiales des enfants ;
- 0,30 € sont versés à une caisse servant à indemniser les accidents du travail ;
- 1,10 € sont versés à un fonds pour le paiement des maladies professionnelles ;
- 7,48 € sont versés pour une modération salariale et destinés à l’équilibre des différents secteurs de la sécurité sociale 0,04 € de charges diverses.
Comme on peut donc le constater, la solidarité existe puisque tout le monde cotise et, comme il s’agit d’un pourcentage, ceux qui gagnent beaucoup cotisent plus que ceux qui gagnent moins.
On peut aussi voir que la part patronale est assez élevée et que c’est sur ces montants-là que des discussions ont lieu lorsque l’on parle d’alléger le coût du travail.
Et, enfin, lorsque vous remplissez votre déclaration d’impôts et que vous avez un supplément à payer, de l’argent part encore pour la sécurité sociale. Sur 100 € d’impôts payés, 22,6 € sont versés pour tous ces services.
Tout ceci pour vous montrer que, par votre travail, vous payez déjà une partie de vos soins de santé (4,70 € enlevés de votre brut + 6,15 € payés par votre patron, soit 10,85 € pour 100 € de salaire brut), sans compter la ponction sur les impôts.Faites le calcul avec votre prochaine fiche de paye et vous verrez que ces sommes ne sont pas négligeables.
Ce sont ces sommes-là qui vous permettent de demander le remboursement de vos soins médicaux et de vos médicaments. De même, une partie de ces sommes-là payent aussi le forfait auprès de la Maison Médicale.Le système de paiement forfaitaire auprès de la Maison MédicaleComme on l’a vu plus haut, vous payez vos soins de santé par le biais de votre travail.
En 1983, des membres de Maisons Médicales se sont interrogés sur l’amélioration de l’accessibilité des soins et sur la recherche d’un autre mode de financement que le paiement à l’acte (où on paye son médecin chaque fois qu’on lui rend visite).
En effet, ils se sont rendu compte que le fait de devoir payer son médecin, son kiné et son infirmière devenait pour certains un handicap financier important et les amenait à choisir de ne plus se soigner.
D’autre part, dans le système à l’acte, le médecin gagne bien sa vie à partir du moment où il voit beaucoup de monde, ce qui induit parfois des attitudes de surconsommation (visites répétées et non nécessaires, par exemple).
Ce sont ces réflexions et bien d’autres, menées avec le GERM (Groupe d’Etude pour une Réforme de la Médecine) qui ont poussé les Maisons Médicales à demander à l’INAMI (Institut National d’Assurance Maladie Invalidité) de pouvoir essayer un autre mode de financement encore plus solidaire: le forfait.
Par ce système, la Maison Médicale touche un montant forfaitaire mensuel fixe pour chaque personne abonnée individuellement, que cette personne vienne ou non. Ce montant résulte de savants calculs réalisés à l’INAMI et est fonction de la moyenne de consommation des différentes catégories de belges (assurés ordinaires, VIPO 75 % et VIPO 100 %).
Pratiquement, si les Belges ont dépensé X millions pour la médecine générale au cours d’une année, le montant du forfait payé à la Maison Médicale sera de X millions divisé par 11 millions de Belges divisé par 12 mois soit x € par mois. Il en va de même pour les soins de kinésithérapie et les soins infirmiers.
C’est votre mutuelle qui nous paye le montant mensuel du forfait. Ce système n’est donc pas « gratuit » puisque vous payez des cotisations par votre travail, cotisations qui permettent à votre mutuelle de payer ces montants. Il est, nous semble-t-il, un système encore plus solidaire que le système à l’acte et c’est pour cela que nous avons choisi d’y passer le 1er avril 1992.
En contrepartie, nous sommes tenus d’assurer à tous les inscrits les soins de médecine générale, de kinésithérapie et les soins infirmiers.
Si ce système permet une accessibilité financière maximale aux soins pour les patients, il ne fonctionne pour la Maison Médicale qu’à partir du moment où nous avons un nombre suffisant d’abonnés pour nous permettre de payer les salaires des soignants et tous les autres frais de fonctionnement. Actuellement, 4600 abonnés nous font confiance et nous leur en savons gré.
De plus, il est souhaitable que chacun use du système avec le même esprit de solidarité. On ne pourrait en effet pas poursuivre ce système si nous étions confrontés à un très grand nombre de patients qui surconsommeraient des soins sans en avoir réellement besoin. Les médecins, kinésithérapeutes et infirmières de la Maison Médicale ne seraient alors plus disponibles pour assurer les soins à ceux qui en ont vraiment besoin. A chacun d’utiliser le système «en bon père de famille».
Nous restons à votre disposition pour tout complément d’information à ce sujet. N’hésitez donc pas à nous interpeller !